L’expérience de l’agression sexuelle dans l’enfance (ASE) peut engendrer des répercussions à long terme en raison de la nature invasive et coercitive de ce trauma. Puisqu’elle implique des gestes à caractère sexuel le plus souvent commis par des proches, l’ASE est particulièrement susceptible de se répercuter dans la vie intime et sexuelle des survivant·e·s. Notamment, la pensée et le discours de plusieurs survivant·e·s traduisent des séquelles profondes au niveau de leur concept de soi sexuel (c.-à-d., perceptions de soi en tant qu’être sexuel). Pour composer avec ces séquelles et d’autres difficultés vécues sur le plan intime, les survivant·e·s peuvent utiliser des stratégies d’évitement de la souffrance, qui en retour favorise la revictimisation. Néanmoins, ces séquelles ne forment pas un destin inaltérable pour les survivant·e·s qui, avec du soutien et un travail personnel, parviennent davantage à mobiliser des stratégies d’approche face aux répercussions de l’ASE sur leur sexualité. D’ailleurs, ces stratégies sont encouragées par une quête d’un soi sexuel plus authentique et contribuent favorablement à leur processus de rétablissement et mieux-être sexuel. À partir de ces constats issus de recherches scientifiques, des pistes d’intervention en lien avec le concept de soi sexuel et les stratégies adaptatives mobilisées sur le plan sexuel seront proposées aux sexologues pour soutenir efficacement les survivant·e·s dans leur processus de rétablissement et la reprise de pouvoir dans leur vie intime et sexuelle.

Conférence donnée par Roxanne Guyon

Roxanne Guyon est professeure dans le domaine de la sexologie au département de psychiatrie et neurosciences de l'Université Laval. Elle est titulaire d'un baccalauréat, d'une maitrise et d'un doctorat en sexologie. Dans le cadre de ses études doctorales, elle s'est intéressée au concept de soi sexuel des survivant·e·s d’agression sexuelle à l’enfance, et notamment son rôle dans les processus adaptatifs déployés dans la vie sexuelle à l’âge adulte. Durant les dernières années, elle a travaillé sur plusieurs projets de recherche portant sur les violences intimes et sexuelles, mais aussi sur les relations intimes et la sexualité positives chez les jeunes. Elle cumule sept années d’expérience en tant qu’éducatrice pour les centres jeunesses, en plus d’avoir animé des ateliers d’éducation à la sexualité en milieux scolaires. Dans le cadre de ses travaux actuels, elle s'attarde à mieux comprendre les expériences intimes et sexuelles des personnes ayant vécu des traumas, ainsi qu'à développer des interventions et améliorer les services destinés aux personnes victimes et de leurs proches, en priorisant une démarche participative et ancrée avec les besoins des milieux de pratique.