Le 02 nov. 2024
Les représentations de la transition à une vie sexuelle active avec partenaire ont évolué à grande vitesse dans les dernières décennies. D’abord considérée dérogatoire dans un cadre « prémarital », parallèlement à la baisse des taux de mariage, cette transition a par la suite été désacralisée pour être davantage considérée comme une tâche développementale. Pendant 30 ans, les recherches au Québec et au Canada montraient une certaine stabilité de l’âge de cette première fois avec un·e partenaire se produisant à la fin de l’adolescence pour la majorité des jeunes. Or, de plus en plus de jeunes atteignent maintenant l’âge adulte sans avoir eu de partenaire sexuel·le, un effet particulièrement marqué chez la génération Z. Cette hausse de l’inexpérience sexuelle à l’âge adulte que l’on observe au Québec et au Canada est également documentée dans d’autres pays, dont les États-Unis, la Suisse, la France, la Hollande et le Japon, entre autres. Or, mes recherches en sexologie développementale révèlent que les trajectoires psychosexuelles de l’adolescence à l’âge adulte diffèrent en fonction de l’âge de cette transition, tant au niveau de ce qui la précède (antécédents) que de ce qui s’en suit (événements subséquents). Cette conférence portera sur les trajectoires de précocité et de tardivité sexuelle et mettra en exergue les effets de l’asynchronie sexorelationnelle (c’est-à-dire les décalages développementaux dans les trajectoires sexuelles et relationnelles, les fluctuations de nature, de rythme et de séquence par rapport à la majorité) sur les trajectoires individuelles et les représentations sociales associées.
Marie-Aude Boislard est professeure titulaire au département de sexologie de l’UQAM, où elle enseigne depuis 2011. Elle dirige le Laboratoire de Recherche sur le Développement Sexuel de l’Adolescent et du Jeune Adulte (Laboratoire DESAJ) et la Chaire de recherche du Canada en sexologie développementale. Psychologue de formation, Pre Boislard s’intéresse aux trajectoires sexorelationnelles et aux transitions et points tournants qui marquent le développement relationnel, sexuel et amoureux, en particulier chez les individus en asynchronie avec leurs pairs, comme les adolescents précoces ou tardifs sexuellement, les adultes inexpérimentés sexuellement et les adultes qui demeurent célibataires. Ses travaux actuels examinent également la trajectoire des hommes qui entrent dans l’incelosphère et le discours de ceux qui tentent d’en sortir.